Les systèmes régionaux des droits de l’homme

Le système de l’Union africaine

I. Introduction🔗

Les violences sexuelles entraînent des conséquences terribles, tant physiques que psychologiques, pour les victimes, leurs proches, les témoins et la société. Pour lutter efficacement contre un tel fléau, il est nécessaire d’unir toutes nos forces et nos initiatives, mais la responsabilité première incombe aux États.

Lucy Asuagbor, Rapporteuse spéciale sur les droits des femmes en Afrique1

L’Union africaine (UA) est « un organe continental composé des 55 États membres qui constituent les pays du continent africain ». Anciennement connue sous le nom d’Organisation de l’unité africaine, l’UA « est guidée par sa vision d’une Afrique intégrée, prospère et pacifique, dirigée par ses propres citoyens et représentant une force dynamique dans l’arène mondiale ». Au sein de l’UA, plusieurs organes « traitent des questions judiciaires et juridiques ainsi que des questions relatives aux droits de l’homme ».2 Dans ce sous-chapitre, l’accent sera mis sur les principaux : la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP) et la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (CADHP).

Créée en vertu de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (pièce maîtresse de la protection des droits de l’homme au sein de l’UA),3 la Commission surveille la mise en œuvre par les États de leurs obligations en matière de droits de l’homme dans le cadre du système de l’UA.

Créée par le Protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif à l’établissement d’une Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (le « Protocole de la Cour africaine »), la Cour a un mandat complémentaire à celui de la Commission. Les conclusions de la Cour sont, contrairement à celles de la Commission, contraignantes pour les parties à une affaire.4

Note aux lecteurs
Sur l’autorité et la question du caractère contraignant des travaux de la Commission et de la Cour, et pour une explication des mesures que la Commission et la Cour peuvent adopter pour faire respecter les obligations des États en matière de droits de l’homme, veuillez consulter le chapitre « Ratification et mise en œuvre des traités », sous-section « Système de l’Union africaine ».

I.1 La violence sexuelle dans le système africain🔗

La Commission a reconnu que la violence sexuelle est « l’une des principales formes de violation des droits de l’homme qui est devenue courante dans les situations de conflit et de crise sur le continent, et qui touche principalement les femmes ».5 La Commission a souligné que la violence sexuelle est interdite « quel que soit le sexe ou le genre de la victime et de l’auteur, et quelle que soit la relation entre la victime et l’auteur ». 6

En outre, la Commission a souligné que la violence sexuelle ne se limite pas à la violence physique et que, outre les actes déjà couverts par le Statut de Rome et le rapport du Secrétaire général des Nations unies,7 , elle peut également prendre la forme de harcèlement sexuel, de viol forcé, de tentative de viol, d’agression sexuelle, de tests de virginité anale et vaginale, d’actes violents sur les organes génitaux (tels que brûlures, décharges électriques ou coups), de pornographie forcée, de nudité forcée, de masturbation forcée et de tout autre attouchement forcé que la victime est obligée de pratiquer sur elle-même ou sur une tierce personne, de castration, de circoncision forcée et de mutilation génitale féminine, ainsi que d’autres pratiques néfastes,8 et de menaces de violence sexuelle utilisées pour terroriser un groupe ou une communauté.9

Bien que la Charte ne contienne pas de dispositions mentionnant directement les violences sexuelles, celles-ci sont interdites par l’article 4, qui protège la vie et l’intégrité de la personne, et par l’article 5, qui interdit les violences sexuelles :

  • Elle consacre le droit de chaque individu « au respect de la dignité inhérente à la personne humaine » ;10
  • Protège « l’intégrité physique et mentale de l’individu » ;11
  • Elle interdit « toutes les formes d’exploitation et d’avilissement de l’homme », en particulier « l’esclavage, la traite des esclaves, la torture, les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants ».12
Note aux lecteurs
La Commission a principalement abordé la question de la violence sexuelle sous l’angle de l’article 5. Ainsi, toutes les références à la torture et aux peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants dans ce sous-chapitre englobent la violence sexuelle.

La dignité humaine est un droit fondamental inhérent auquel tous les êtres humains, quelles que soient leurs capacités mentales ou leurs handicaps, peuvent prétendre sans discrimination.13 La torture et les peines et traitements cruels, inhumains ou dégradants (« mauvais traitements ») portent atteinte à la dignité humaine et comprennent « non seulement les actes qui causent de graves souffrances physiques ou psychologiques », mais également ceux qui humilient l’individu ou le forcent à agir contre sa volonté ou sa conscience.14

Si le viol peut constituer une violation de l’article 5,15 il n’existe pas de critères explicites permettant de déterminer quand la violence sexuelle peut être assimilée à de la torture ou à des mauvais traitements. Toutefois, la Commission a estimé que les États devraient interpréter l’interdiction de la torture et des mauvais traitements de la manière la plus large possible, « afin d’englober l’éventail le plus large possible d’abus physiques et mentaux ». 16

La question de savoir si un acte entre dans le champ d’application de l’article 5 « dépend de toutes les circonstances de l’espèce, telles que la durée du traitement, ses effets physiques ou mentaux et, dans certains cas, le sexe, l’âge et l’état de santé de la victime ».17 La torture, comme forme plus grave de mauvais traitements, est le fait d’infliger intentionnellement et systématiquement des douleurs et des souffrances physiques ou psychologiques pour punir, intimider ou recueillir des informations. Son but « est de contrôler les populations en détruisant les individus, leurs chefs et en effrayant des communautés entières ».18

Dans l’affaire Egyptian Initiative for Personal Rights (EIPR) et Interights contre la République arabe d’Égypte, la Commission a décidé que différents actes invasifs de nature sexuelle, à savoir arracher les vêtements des femmes, toucher leurs « parties intimes » et les traiter de noms injurieux, constituaient ensemble un traumatisme physique et émotionnel et avaient des conséquences physiques et mentales.19 Lorsqu’elle a analysé le niveau de souffrance causé par ces actes, la Commission a déclaré qu’ils étaient suffisamment graves pour constituer un traitement inhumain et dégradant, et donc une violation de l’article 5.20

En vertu du protocole de Maputo, la violence sexuelle est interdite comme forme de violence à l’égard des femmes.21

I.2 L’existence d’un lien entre les violences sexuelles et les conflits🔗

Il n’est pas nécessaire d’établir un lien entre la violence sexuelle et le conflit pour obtenir une protection dans le cadre du système africain. 22

La Commission a toutefois noté que l’existence d’un conflit devrait éveiller les soupçons : il est impossible pour les « victimes de violences sexuelles de donner leur consentement dans des circonstances de violence généralisée et d’atrocités de masse au cours desquelles des crimes internationaux sont commis ». Par conséquent, le consentement ne devrait pas être présumé dans les cas de VSLC. 23

En outre, la notion de conflit est plus large que celle du droit international humanitaire. La Commission a décrit les conflits comme couvrant « les différends politiques et/ou sociaux violents et durables », et qu’ils comprennent également d’autres situations de crise d’une gravité inférieure à celle d’un conflit armé, « telles que des conditions d’instabilité majeure ou de violence ne nécessitant pas le recours à une force armée organisée ».24 La Charte ne contenant pas de clause dérogatoire, les États ne peuvent pas invoquer les conflits, les situations d’urgence ou les circonstances particulières pour justifier une « limitation des droits et libertés consacrés par la Charte ».25

Le protocole de Maputo reconnaît également que la violence sexuelle peut se produire aussi bien en temps de paix qu’en période de conflit armé. Selon le protocole, la violence à l’égard des femmes comprend « tous les actes perpétrés contre les femmes qui leur causent ou pourraient leur causer un préjudice physique, sexuel, psychologique et économique, y compris la menace de tels actes », « dans la vie privée ou publique, en temps de paix et dans les situations de conflit armé ou de guerre ».26 Par conséquent, la violence à l’égard des femmes couvre expressément la VSLC.

I.3 Qui est victime ?🔗

Une personne est une victime « que l’auteur de la violation soit ou non identifié, appréhendé, poursuivi ou condamné, et quel que soit le lien de parenté ou autre entre l’auteur et la victime ». Le terme « victime » englobe également la famille immédiate touchée, « les personnes dont la victime a la charge » ou les personnes à charge de la victime, en particulier les enfants nés d’un viol,27 ainsi que les personnes qui ont subi un préjudice en aidant les victimes ou en prévenant la victimisation. 28

Toute personne, quel que soit son sexe, peut être victime de violence sexuelle et sexiste. Si la violence sexuelle et sexiste est principalement perpétrée à l’encontre des femmes et des filles, les actes de violence sexuelle à l’encontre des hommes et des garçons, des personnes souffrant de handicaps psychosociaux et des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués sont tout aussi préoccupants.29

II. Le cadre juridique🔗

III. Obligations découlant de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples🔗

La prévention🔗

III.1 Les États doivent adopter des mesures législatives ou autres pour protéger les personnes contre la VSLC🔗

III.2 Les États doivent éduquer leur population sur les violences sexuelles à l’égard des femmes🔗

III.3 Une protection spéciale contre la VSLC est due aux personnes susceptibles de faire l’objet d’une discrimination🔗

III.4 Les personnes privées de liberté doivent bénéficier d’une protection spéciale contre les VSLC🔗

III.5 Les États devraient ratifier d’autres instruments pertinents pour l’éradication de VSLC🔗

III.6 Les États devraient promouvoir et soutenir la coopération avec les mécanismes internationaux visant à mettre fin aux VSLC🔗

Justice et responsabilité🔗

III.7 Les États doivent mener des enquêtes efficaces sur la VSLC et traduire les auteurs de ces actes en justice🔗

III.8 Les États doivent garantir l’accès à la justice pour les victimes/survivants de la VSLC 🔗

III.9 Les États doivent protéger les victimes/survivants de la VSLC contre de nouvelles violences🔗

Réponse humanitaire🔗

III.10 Les États doivent fournir aux victimes/survivants de VSLC des soins appropriés.🔗

Réparations🔗

III.11 Les États doivent offrir aux victimes/survivants de VSLC des voies de recours🔗

IV. Obligations découlant du protocole à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique (Protocole de Maputo) 🔗

La prévention🔗

IV.1 Les États doivent adopter et mettre en œuvre des mesures appropriées pour éliminer la VSLC 🔗

IV.2 Les États doivent protéger les femmes dans les conflits armés conformément au droit international humanitaire 🔗

IV.3 Une protection spéciale contre la VSLCest due aux femmes qui risquent d’être victimes de discrimination🔗

IV.4 Les États doivent éduquer leur population sur la VSLC🔗

IV.5 Les États doivent assurer et contrôler la mise en œuvre du protocole de Maputo afin de lutter efficacement contre les VSLC🔗

Justice et responsabilité🔗

IV.6 Les États doivent punir de manière appropriée et efficace les auteurs de VSLC🔗

IV.7 Les États doivent permettre aux victimes/survivants de la VSLC d’accéder à la justice🔗

Réponse humanitaire🔗

IV.8 Les États doivent garantir les droits sexuels et reproductifs des victimes/survivants de la VSLC🔗

Réparations🔗

IV.9 Les États doivent offrir des voies de recours appropriées aux victimes/survivants de la VSLC🔗

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